lundi 19 juillet 2010

Lénine et la littérature / לענין און ליטעראַטור

Un extrait d'un article de la femme de Lénine (1869-1939) sur son rapport à la littérature, ou comment justifier l'attachement de Lénine à un chant bien peu marxiste. Comme quoi, même les idéologues les plus rigoureux ont leurs petites faiblesses...

.....Une femme de ménage française venait régulièrement chez nous pour quelques heures. Un jour, Ilitch l’entendit chanter. Il s’agissait d’un chant alsacien, Ilitch demanda à la femme de ménage de le chanter à nouveau et d'en dire les paroles ; et par la suite il le chanta très souvent. Il se terminait par ces mots :

« Vous avez pris l’Alsace et la Lorraine,
Mais malgré vous nous resterons Français,
Vous avez pu germaniser la plaine,
Mais notre cœur - vous ne l’aurez jamais ! »

.....Cela se passait en 1909 - l’époque de la réaction. Le parti était à terre mais son esprit révolutionnaire n’était pas brisé et ce chant s’harmonisait avec l’état d’esprit de Lénine. Il fallait entendre comment les paroles du chant sonnaient dans sa bouche : « Mais notre cœur – vous ne l’aurez jamais ! »

.....Durant ces années, les plus difficiles de l’émigration, au sujet desquelles Ilitch parlait toujours avec une grande douleur (déjà rentrant en Russie, il répétait, ce qu’il n’avait jamais dit avant, : « et pourquoi donc sommes nous partis de Genève pour aller à Paris ?» ), dans ces dures années il rêvait obstinément et continuellement, il rêvait pendant qu’il discutait avec Montaigue (?), pendant qu’il chantait en vainqueur le chant alsacien et pendant qu’il lisait avec attention pendant des nuits sans sommeil.

N. Krupskaïa, « Lénine et la littérature », in Parizer Tsaytshrift, n°4, Paris, 1954, pp. 32-33.


L'article ne donne pas de nom de traducteur, Krupskaïa était-elle juive et/ou connaissait-elle le yiddish ?

dimanche 4 juillet 2010

D'une haute fenêtre / פֿון אַ הױכן פֿענצטער

Shnéour Zalman (1887-1959)
Né en Biélorussie, il habite ensuite à Odessa, Varsovie, Vilnius et Paris, qu'il quitte en 1940 pour les Etats-Unis avant d'immigrer en Israël en 1951. Il est considéré avec Sholem Asch et David Bergelson comme faisant partie des meilleurs écrivains ayant succédé à la génération de Sholem Aleichem, Isaac Leib Peretz et Mendele Moïsher Sforim.
Il a écrit aussi bien en hébreu qu'en yiddish.

Une remarque intéressante dans l'introduction, "es farshteyt sikh, az vos neenter a lid iz tsu unzer yortsendling alts kreftiker iz di shprakh un bulter der inhalt", "il est évident que plus un poème est proche de notre décennie, plus vigoureuse en est la langue et plus clair le contenu".

D’une haute fenêtre

Un jour, j’ai vu un coucher de soleil
Dans une grande ville agitée, depuis une mansarde,
D’un haut nid où habitent les artistes.
Ce fut un extraordinaire coucher de soleil !
Un orage d’été s’est d’abord invité,
Une averse a ensuite trempé, forgé de petits bijoux
Sur une forêt rebelle de cheminées, de coupoles et de toits ;

Paris, 1910

Quarante ans 1903-1944, p.185 (disponible ici)

פֿון אַ הױכן פֿענצטער

איך האָב אַמאָל געזען אַ זונען-אונטערגאַנג
אין אַ צעהיצטער גרױסער שטאָט פֿון אַ מאַנסאַרע,
פֿון אַ הױכ נעסט -- װאו ס'װאױנען קינסטלער.
אַ װילדער זונען-אונטערגאַנג איז דאָס געװעזן !
אַ זומער שטורעם האָט זיך ערשט אַדורכגעטראָגן,
אַ רעגנדל האָט נאָך געשפּריצט, געזיפּט בריליאַנטלעך,
איבערן בונטן װאַלד פֿון קױמענס, קופּעלן און שפּיצן ;
...
פּאַריז, 1910

פֿערציק יאָרז1944-1903,זז.185ע

vendredi 2 juillet 2010

Aumône / צדקה

Mar Oukva était exilarque à Babylone au IIIe s. av. J.-C.
Le conte yiddish s'inspire d'un fait rapporté par le Talmud (traité Ketubot 63) mais la version yiddish diffère en ce que le pauvre boit des vins chers alors que le Talmud rapporte qu'il se servait du vin pour parfumer sa maison.

Aumône

Mar Oukva était un homme riche et non loin de chez lui habitait un pauvre. Chaque année, la veille de Yom-Kippour, Mar Oukva avait l'habitude d'envoyer au pauvre quatre-cents zouzim afin qu'il ait de quoi vivre. Mar Oukva agit ainsi longtemps, année après année. Il avait l'habitude d'envoyer l'argent par l'intermédiaire de son serviteur.
Un jour, Mar Oukva envoya l'argent par l'intermédiaire de son fils. Peu de temps après, son fils revint à la maison et rendit tout l'argent à son père.
- Pourquoi as-tu ramené l'argent, demanda le père, pourquoi ne l'as tu pas donné à ce pauvre homme ?
- Il n'en a pas besoin, répondit le fils.
- Mon enfant, que veux-tu dire par "il n'en a pas besoin", demanda Mar Oukva, comment sais-tu qu'il n'en a pas besoin ?
- Parce que quand j'étais chez lui, j'ai vu qu'on y buvait des vins vieux et chers, expliqua le fils.
- S'il en est ainsi, dit Mar Oukva, ce doit donc être un homme habitué aux bonnes choses et il lui faut plus d'argent.
Mar Oukva doubla la somme et depuis ce jour envoya au pauvre huit-cents zouzim au lieu de quatre-cents.

Zevin Y. Y., Contes pour enfants, p.11-12, (disponible ici).

צדקה

מר-עוקבא איז געװען אַ רײכער מאַן, און ניט װײט פון זײן הױז האָט געװאױנט זעהר אַן אָרימ
ער מאַן. יעדען יאָהר, גראַדע אום ערב יום כּפּור, פלעגט מר-עוקבא צושיקען דעם אָרימען מאַן פיער הונדערט זוזים אום ער זאָל האָבען פון װאָס צו לעבען. אַזױ האָט מר-עוקבא געטאָן יאָהר פאַר יאָהר, אַ לאַנגע צײט. דאָס געלד פֿלעגט ער צושיקען דורך זײן דיענער.
אײנמאָל האָט מר-עוקבא די פיער הונדערט זוזים געשיקט דורך זײן זוהן. אין אַ קורצע
צײט איז דער זוהן געקומען אַהײם און צוריק געגעבען זײן פאָטער דאָס גאַנצע געלד.
"װאָרום האָסטו דאָס געלד צוריקגעבראַכט ?" האָט דער פאָטער געפרעגט, "וואָרום האָסטו דאָס ניט אָפּגעגעבען דעם אָרימען מענטשען ?"
"ער דאַרף דײן געלד ניט", האָט דער זוהן געענטפערט.
"װאָס מײנסטו מײן קינד, ער דאַרף ניט ?" האָט מר-עוקבא געפרעגט. "פון װאַנען װײסטו אַז ער דאַרף ניט ?"
"װײל", האָט דער זוהן ערקל
ערט, "װײל אַז איך בין געװען בײ איהם אין הױז האָב איך געזעהן װי מען טרינקט בײ איהם טײערען אַלטען װײן".
"אױב אַזױ", האָט מר-עוקבא געזאָגט, "מוז ער דאָך זײן אַ מענש װאָס איז געװאױנט צו גוטע זאַכען און ער דאַרף האָבען מעהר געלד."
מר-עוקבא האָט די סומע פאַרדאָפּעלט און האָט זײט דאַן אָנגעפאַנגען צו שיקען דעם אָרימאַן 800 זוזים אַנ
שטאַט.400..........
400............................
מ
עשהלעך פאַר קינדער, י. י. זעװין